lundi 28 octobre 2013

Mémoriser c'est structurer, et apprendre c'est inhiber!

"L'apprentissage est une modification de la capacité à réaliser une tâche sous l'effet d'une interaction avec l'environnement." (Olivier Houdé, psychologue français)

Quoi de neuf du côté de la "neuropédagogie"


I. La mémoire: quelques mises au point s'imposent

Alain Lieury, chercheur à Rennes 2  et auteur de l'ouvrage "Le livre de la mémoire" paru cette année, nous donne à l'occasion d'une interview des précisions intéressantes au sujet de la mémoire:

- "Beaucoup de gens pensent à tort qu’il existerait une mémoire visuelle, auditive ou olfactive. En réalité, nous savons que les mémoires sensorielles sont éphémères."

- "Des expériences ont montré que des bruits simples (circulation ou aspirateur) ne gênent pas la mémorisation. C'est la même chose pour la musique, classique ou jazz. En revanche, dès qu'il y a des paroles, surtout si elles sont en français, il y a une baisse de l'efficacité de 40 % ou plus."

- "On ne peut pas tout apprendre. C’est pourquoi il est important de structurer l’information avec des chapitres, des sous-chapitres… Il faut vraiment rédiger ce résumé soi-même et éviter d’acheter des fiches dans le commerce car c’est le travail que vous aurez effectué qui vous permettra de mémoriser l’information.

II. Pour apprendre, il faut inhiber nos savoirs naïfs!
Des recherches récentes montrent que le processus d'apprentissage, généralement conçu comme une réorganisation conceptuelle, se définit davantage comme le développement de la capacité à inhiber nos conceptions spontanées.


Voyons cela à partir d'un exemple concret. Une étude (1) datant d'une vingtaine d'année a montré que plus de 25 % des étudiants de première année du baccalauréat en physique croient qu'une balle de métal de la même grosseur qu'une balle en plastique tombera plus rapidement au sol (dans un environnement sans résistance de l'air), et ce, même après un enseignement formel donné sur ce sujet.

Dans une étude réalisée en 2012, Lorie-Marlène Brault Foisy et Steve Masson (Université du Québec à Montréal) montrent que "l'éducation scientifique a des effets tangibles sur le fonctionnement du cerveau". En effet, ces chercheurs ont mis en évidence que les cerveaux de personnes expertes en physique mécanique et de novices en cette science réagissent différemment lorsqu'ils évaluent le même stimulus (la fameuse chute d'une balle de métal et d'une balle en plastique). D'après eux, "Si l'on considère que les activations sont plus prononcées dans le cortex préfrontal pour les experts que pour les novices, il semble que l'inhibition jouerait réellement un rôle dans l'apprentissage de concepts en physique mécanique. Durant le processus d'apprentissage de la mécanique, un élève apprendrait donc davantage à inhiber ses conceptions fréquentes qui lui viendraient spontanément à l'esprit plutôt qu'à les éradiquer ou les restructurer." 

Cette capacité à inhiber, tellement importante dans le processus de l'apprentissage, fait appel au raisonnement, à l'imagination, mais aussi au changement de paradigme. Ainsi, développer une "pédagogie du cortex préfrontal" permettrait de développer les capacités d'inhibition qui sont à l'origine des biais de raisonnement, des erreurs et donc des difficultés d'apprentissage. (Cerveau & Psycho - Mars Avril 2013)

Nathanaël LAURENT
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(1) Wandersee, J. H., Mintzes, j. ]., & Novak, j. D. (1994). Research on alternative conceptions in science. In D. L. Gabel (Ed.), Handbook ofresearch on science teaching and learning Opp. 177-210). New York: Macmillan


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